texte rédigé par Victor, réalisateur du film documentaire "le vélo-doc en Bourgogne", après son passage au sanctuaire :
11/10 : Arrivé en gare de Nevers, j’enfourche de nouveau La Butineuse pour ma dernière destination hors Dijon.
Il me faut trois heures pour rallier Chantenay-Saint-Imbert, où se trouve le Domaine des Douages. Sur le chemin je m’arrête devant le bistrot « au rendez-vous des chasseurs », seulement pour prendre une photo, rien d'autre ! Nous sommes en octobre et il fait frais lorsque j’arrive dans ce sanctuaire pour animaux. J’y retrouve Dominique, qui est occupée comme toujours à prendre soin des animaux qu’elle recueille ici.
Je comprends très rapidement que le rapport au temps n’est pas le même que dans les autres lieux visités jusqu’à présent. Les tâches à effectuer sont nombreuses, l’énergie humaine nécessaire. Et pour cause : ici sont recueillis plus de 850 animaux. Vaches, poules, coqs, ânes, chevaux, poneys, canards, oies, cochons, moutons, chèvres, chats, chiens… Il est difficile de se faire une idée générale de toutes les âmes qui peuplent ce vaste espace de paix, de retraite. Ils occupent pas moins de cent hectares entre champs, granges et bergerie. On ne parle pas d’étable ici, aucun animal n’est exploité. Certains ont connu des traitements inqualifiables, proviennent d’élevage, sont rescapés d’abattoirs, ont été abandonnés, d’autres sont très malades. La beauté de cet asile et la présence de toutes ces vies si marquées embarquent très vite mes émotions.
Mais tout de suite Dominique m’engage dans le mouvement de la réalité quotidienne. Je me cramponne comme je peux avec une seule main sur son quad, en tentant de filmer avec l’autre. Comme chaque soir, elle amène les moutons à l’intérieur pour les nourrir et les protéger. Un de ces moutons reste seul dans les champs, ce qui nous interpelle. Dominique et Laurent réussissent à l’attraper et l’isolent dans un box pour une scène que je ne m’attendais pas à vivre. Il faut tondre la laine pour voir s’il n’y a pas un problème. Blanche en surface, la laine tombe sous nos regards et laisse apparaître des bouts de peau rongés à vif par des larves. Les grosses plaies noires me font comprendre la douleur de ce mouton. Certaines mouches viennent pondre là où elle trouve de la chaleur, sous la laine. Puis des asticots naissent et y prolifèrent, en se nourrissant du corps de l’animal encore vivant.
Je suis sous le choc, je filme tout. Je réalise la détresse de ces animaux et la violence de leur exploitation qui les rend dépendant des humains.
Autour du repas, Dominique m’explique que dans ce sanctuaire si énorme (le plus grand du pays), les ressources ne proviennent que de dons de particuliers. Elle y vit avec un RSA depuis 12 ans et fait don de tout son temps, toute son énergie pour le bien-être de tous ces animaux. Seul un employé est là pour l'aider. Le sanctuaire manque de fonds, la situation est critique.
D’ailleurs, vous pouvez faire un don pour soutenir le Domaine des Douages. Et relayer ces infos afin que des aides publiques viennent à existeJe suis bouleversé par ces histoires incroyables. Je vais m’endormir dans ma tente, sur un champ dans le froid. Le réveil sonnera tôt demain.